Pourquoi ce sujet est incontournable pour les soignants
Le sommeil est un pilier fondamental de la santé. Pourtant, dans un quotidien saturé d’écrans, il est souvent relégué au second plan. Les professionnels de santé le constatent au quotidien : fatigue chronique, troubles de l’attention, instabilité émotionnelle… Et si ces signes cliniques prenaient racine, au moins en partie, dans nos usages numériques ?
Après avoir exploré, dans le chapitre précédent, comment l’hyperconnexion impacte la motivation, l’attention et les fonctions exécutives à travers le prisme de l’activité physique (cf. chapitre 2 : Hyperconnexion et sport), nous poursuivons notre série avec un sujet tout aussi fondamental pour les professionnels de santé : le sommeil.
Dans un monde où smartphones, séries jusqu’à minuit et notifications incessantes sont devenus la norme, le sommeil – pourtant pilier de la santé – est en danger. Professionnels de santé, vous voyez chaque jour des enfants épuisés, des adolescents déconcentrés, ou des adultes en insomnie chronique. Et si une partie de la solution passait par une question simple : que font-ils avec leurs écrans avant de dormir ?
Dans ce nouvel article de notre série #Hyperconnexion, découvrez une synthèse clinique, basée sur les données les plus récentes, des impacts du numérique sur le sommeil à tous les âges – et des outils concrets pour agir dès demain.
Exposition aux écrans et troubles du sommeil : quelle ampleur ?
Les données montrent que 50 % des adolescents présentent des troubles du sommeil, 30 % des enfants dorment moins que recommandé, et 30 % des adultes souffrent d’insomnie ou de somnolence diurne (OMS, 2024 ; INSPQ, 2023). L’impact est massif et global.
Enfants (0–12 ans)
En France, les enfants de 6 ans dorment en moyenne 15 minutes de moins qu’il y a 20 ans, en partie à cause des écrans (INSPQ, 2023). Au Canada, 30 % des enfants ne respectent pas les durées de sommeil recommandées, et 20 % présentent des symptômes d’insomnie ou de somnolence (Chaput & Janssen, 2024). La simple présence d’un écran dans la chambre est corrélée à une réduction de la qualité du sommeil.
Adolescents (13–18 ans)
Les adolescents sont particulièrement à risque : 50 % présentent des troubles du sommeil, et 10 % une insomnie clinique (OMS, 2024). La dette de sommeil augmente de 15 % à 11 ans à 35 % à 15 ans. En Île-de-France, 60 % utilisent un écran après le dîner et 20 % se connectent en pleine nuit (ORS, 2020). À 17 ans, 50 % passent plus de 4 heures par jour sur écran.
Adultes (≥ 18 ans)
Près de 90 % des adultes utilisent un média numérique avant de dormir, majoritairement le smartphone (INSPQ, 2023). Environ 30 % souffrent de troubles du sommeil chroniques, aggravés par les usages numériques tardifs (Zhong et al., 2025).
Solutions cliniques et pistes d’action concrètes
Recommandations par tranche d’âge
- 0–2 ans : zéro écran.
- 2–5 ans : max. 1h/jour sous supervision. Pas d’écran 1h avant le coucher.
- 6–12 ans : pas d’écran dans la chambre, couvre-feu numérique à 20h.
- 13–18 ans : extinction 1h avant le coucher, téléphone hors chambre.
- Adultes : 1–2h sans écran avant le sommeil, chambre sans écran, mode avion ou veille.
Interventions efficaces
- Outils numériques : applications de suivi, filtres lumière bleue, mode nuit.
- Programmes éducatifs : interventions en milieu scolaire, campagnes de sensibilisation (#JournéeDuSommeil), protocole PASTI (Pickard et al., 2024), programme Mémé Ton Pyj (Université Lyon 1 & CRNL), dCBT-I comme Sleepio ou SHUTi OASIS (Hwang et al., 2025).
- Thérapies comportementales (TCC-I) : restructuration du sommeil et accompagnement des usages numériques.
- Guidance parentale : chartes familiales, boîtes à dodo, routines apaisantes.
Outils cliniques disponibles
- PSQI – Pittsburgh Sleep Quality Index (CHU Angers)
- ESS – Échelle de somnolence d’Epworth (HAS)
- ISI-FR – Insomnie de Sévérité (Revue Médecine du Sommeil)
- Journal de sommeil (HAS)
- Score Horne & Östberg (CHU Clermont-Ferrand)
Bénéfices observés
- Gain de 20 à 30 minutes de sommeil avec un couvre-feu à 21h (Schwartz et al., 2019).
- Réduction des réveils nocturnes chez les tout-petits (Pickard et al., 2024).
- Amélioration de la mélatonine et de la qualité du sommeil avec des lunettes filtrantes ou mode nuit (Chellappa et al., 2020).
Pour aller plus loin
📏 Chapitre précédent : Hyperconnexion et sport : quand le cerveau saturé freine le mouvement (Chapitre 2/6)
Références
- Chaput, J.-P., & Janssen, I. (2024). Utilisation des médias sociaux et santé du sommeil chez les adolescents au Canada. PSPMC, 44(7/8), 375–384.
- Institut national de santé publique du Québec. (2023). Effets des écrans sur la santé mentale et physique. inspq.qc.ca
- Observatoire Régional de la Santé Île-de-France. (2020). Effets des écrans sur le sommeil des adolescents – Focus Santé.
- OMS. (2019). Recommandations sur l’activité physique, le sommeil et le temps d’écran pour les enfants de moins de 5 ans. Genève : Organisation Mondiale de la Santé.
- OMS. (2024). Les adolescents, les écrans et la santé mentale. Bureau Europe.
- Schwartz, S. et al. (2019). Impact d’un usage intensif des écrans sur le sommeil et les performances scolaires. Université de Genève & HUG.
- American Academy of Pediatrics. (2023). Where We Stand: Screen Time. HealthyChildren.org.
- Zhong, J. et al. (2025). Screen-based media use and adult sleep health: a systematic review. JAMA Pediatrics, epub ahead of print.
- Pickard, H., et al. (2024). Screen time before bed and sleep outcomes in early childhood: A randomized controlled trial. JAMA Pediatrics, 178(5), 456–463.
- Chellappa, S. L., et al. (2020). Impact of evening light exposure on melatonin suppression and sleep. Journal of Sleep Research, 29(4), e13097.
- Hwang, J., et al. (2025). Efficacy of digital cognitive behavioral therapy for insomnia: A meta-analysis. Sleep Medicine Reviews, 75, 101941.
Cet article fait partie de la série « #Hyperconnexion » proposée par MonRFS
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