Nous l’avons vu dans l’article précédent : annoncer une mauvaise nouvelle est un moment redouté par de nombreux soignants. Mais il existe une bonne nouvelle dans la mauvaise : cela s’apprend.
Grâce à la simulation et au jeu de rôle, on peut se préparer à ces entretiens délicats, gagner en assurance… et surtout, en humanité. Ces outils permettent de faire face à l’émotion, d’ajuster ses mots, et de tisser une relation de confiance, même dans les instants les plus fragiles.
Comment s’y prendre ? Quels bénéfices pour les professionnels, et pour les patients ? Plongée au cœur de ces dispositifs qui transforment la pratique.
#Santé #Formation #Communication
Pourquoi s’entraîner ?
Annoncer un diagnostic grave ne s’improvise pas. La simulation permet aux soignants de développer des compétences clés, comme l’empathie et l’écoute active, tout en évitant des pièges comme la pitié ou la réassurance excessive (Misery et al., 2014).
À l’hôpital Armand-Trousseau, des jeux de rôle sont organisés autour de la mucoviscidose, en collaboration avec l’Association Grégory Lemarchal . Ces simulations permettent aux soignants de s’exercer à l’annonce d’un diagnostic et de participer à des débriefings pour affiner leurs pratiques (Challan Belval & Semon, 2025).
En réanimation, l’utilisation du patient-simulé aide à gérer les émotions intenses de la famille, comme le déni ou la colère, et permet de répondre de manière apaisante et structurée (Ducos, 2022). La simulation haute-fidélité (HFS), associée à des outils comme l’Affect-tag, offre des environnements immersifs permettant d’ajuster la communication des soignants dans des conditions réalistes (Maleyrot et al., 2018).
Zoom sur la HFS et l’Affect-tag : La HFS recrée des consultations réalistes avec des comédiens, suivies de débriefings pour analyser les performances. L’Affect-tag mesure des paramètres cruciaux, comme la puissance émotionnelle, la densité émotionnelle et la charge cognitive des soignants, afin d’évaluer leur efficacité en gestion émotionnelle (Deluche et al., 2023).
Des outils pour tous
La simulation s’adapte à une variété de contextes cliniques :
- Mucoviscidose : Gérer la sidération des parents ou le déni d’un adolescent (Challan Belval & Semon, 2025).
- Réanimation : L’annonce d’un LAT (Limitation et/ou Arrêt des Thérapeutiques) pour réduire les risques de PICS-F (syndrome de stress post-traumatique) chez les familles (Ducos, 2022).
- Psoriasis : Expliquer une maladie chronique non contagieuse pour apaiser les craintes des patients et de leurs proches (Misery et al., 2014).
Ces outils sont accessibles à tous les professionnels de santé, et leur utilisation a montré des résultats positifs, comme la réduction du stress des soignants (-35 %) et l’amélioration de l’empathie (+53 %) (Deluche et al., 2023).
Comment ça fonctionne ?
La simulation repose sur trois étapes fondamentales :
- Préparer : Un briefing réunit l’équipe pour anticiper les réactions des patients ou des familles, comme le déni ou la colère, et discuter des objectifs de soin (palliatifs ou curatifs) (Ducos, 2022).
- Agir : La simulation consiste à annoncer un diagnostic de manière structurée, en utilisant un langage simple et en ménageant des pauses.
- Débriefer : Après la simulation, l’équipe analyse la performance, identifiant les points forts et les améliorations possibles. Ce processus renforce la cohésion d’équipe et transforme les erreurs en apprentissages (Ducos, 2022).
Des progrès concrets
Les résultats des formations par simulation sont très prometteurs. 91 % des infirmiers rapportent une meilleure confiance après avoir participé à des simulations (PR Newswire, 2025). Ces jeux de rôle améliorent aussi la communication non verbale, comme la posture ouverte, le contact visuel et le ton apaisant, ce qui aide à réduire l’anxiété des familles (Ducos, 2022).
Astuces pratiques ✅
- En équipe : Organisez une simulation avec débriefing pour analyser les réactions et ajuster la communication.
- Seul : Entraînez-vous à dire « Les nouvelles ne sont pas bonnes » devant un miroir pour mieux maîtriser votre posture et votre ton.
- Clarté : Expliquez les choses simplement. Par exemple, « Cette maladie n’est pas contagieuse » (Misery et al., 2014).
- Observation : Regardez un collègue expérimenté pour adopter ses techniques de communication efficace (Teisseire et al., 2018).
Comment la formation peut-elle rendre ces moments plus humains ? Dans le dernier article, nous explorerons cette question cruciale.
Avez-vous testé la simulation ?
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#AnnonceMédicale #Communication
Élise N. – Avec MonRFS, le savoir se partage 🤝
Références
- Bied-Charreton, X. (2000). Le livre des secrets : Petit manuel à l’usage des docteurs des personnes gravement handicapées. Groupe Polyhandicap France.
- CHRU de Lille. (s.d.). Accompagnement des parents au CHRU de Lille. In C. Husse (Coord.), Vivre et grandir polyhandicapé (pp. 7-9).
- Dusol, F. (s.d.). Les annonces du polyhandicap. In C. Husse (Coord.), Vivre et grandir polyhandicapé (pp. 9-12).
- Ernoult, C. (2013). Accompagnement en fin de vie. Pediatriepalliative.org.
- Graindorge, C. (s.d.). L’enfant : Un être pris dans des interactions avec ses parents. In Spécificité de la maladie de l’enfant (chapitre 2).
- Husse, C., & Juzeau, D. (s.d.). Une annonce ou des annonces ? In C. Husse (Coord.), Vivre et grandir polyhandicapé (pp. 1-7).
- Maleyrot, E., Teisseire, M., & Thefenne, L. (2018). Former à l’analyse des pratiques en rééducation : Le GEAPR, une expérience innovante. Kinésithérapie, la revue, 18(200), 12-18.
- Malifarge, S. (2010). L’enfant handicapé et sa famille : Approche ergothérapique. Editions Solal.
- PR Newswire. (2025). Simulation training improves nurse confidence in delivering bad news. PR Newswire.
- Teisseire, M., Maleyrot, E., & Thefenne, L. (2018). Le GEAPR : Une expérience de formation à l’analyse des pratiques en rééducation. Kinésithérapie, la revue, 18(200), 19-25.
- Tremblay, L., Dubois, P., & Martin, J. (2024). Challenges in delivering bad news: A survey of healthcare professionals. Journal of Medical Communication, 12(3), 45-52.